À toi, mon dernier bébé, mon petit miracle.
Je t’écris pour te confesser l’inavouable. Lorsque tu m’as annoncé ta visite, j’ai pleuré. Mais pas de joie. Je souhaitais museler la cigogne. Pour qu’elle cesse de me faire de fausses promesses.
Je ne voulais pas que tu sois. Je refusais cette croix sur un bout de plastique. Cette annonce d’un chemin de croix, dont le nombre d’étapes demeure incertain. À quand la fin sans résurrection possible? À quand la vie éternelle dans un recoin de mon cœur? Vas-tu me quitter dès les premières semaines, dans une mare de sang? Me signaleras-tu ton absence lors de l’échographie de datation? Préfèreras-tu t’éteindre entre deux rencontres virtuelles? Ou auras-tu, toi aussi, la cruauté de me laisser choisir ta destinée, t’offrir une vie sans qualité ou un départ précipité?
Je ne voulais pas que mes règles soient en retard. J’espérais qu’elles soient à jamais disparues. Que cette machine si faillible cesse de m’envoyer des signaux d’espoir mensuellement. J’avais enfin fait mon deuil. Je m’étais débarrassé de tout ce qui me rappelait ce bébé que je n’aurais plus. Je souhaitais que mon corps me suive. Qu’il passe à autre chose.
Mais t’étais là. Bien vivant. Bientôt fringant.
Quand l’angoisse s’introduit, elle contamine tout. Elle nous grignote l’humeur, la santé et le jugement. J’ai cultivé mon jardin de peurs malgré un examen complet de ton anatomie. Peur de toi. De tous les problèmes de santé imperceptibles lors de la vie utérine dont tu pourrais être atteint. De tous les défis que tu pourrais représenter. De moi, de mon âge, de ma fatigue, de mon usure. Du manque de temps. De notre unique salle de bain. Du regard des autres parfois si blessant. On aspire tous au statut de parents cools. Toi, t’auras les parents vieux.
Ma confiance s’est reconstruite à la manière d’un casse-tête. D’abord un cœur qui bat. Ensuite, un corps qui pousse. Des chromosomes en bonne quantité. Une colonne et un crâne parfaitement formé. Un bout de masculinité pour affirmer ton identité. La douce sensation d’une valse aquatique pour me rappeler que tu n’es pas qu’une image sur un écran. La dure sensation d’un combat de boxe entre mes organes et toi, pour me prévenir de ton arrivée imminente. Et ensuite, ta grosse caboche, la chaleur de ton petit corps et ce regard que je tentais de capturer. La dernière pièce d’un casse-tête. La première pièce de notre vie terrestre.
Il y a trois ans aujourd’hui, je t’accueillais dans notre vie. Même si je m’étais départie de tous mes trucs de bébé (parce que ça m’arrachait le cœur chaque fois que je les voyais), je n’avais jamais cessé de t’attendre. Tu m’as chaviré le cœur au premier regard. Même si je les aime à la folie, j’ai eu besoin d’apprivoiser ton frère et tes sœurs. Parce que je devais apprivoiser la maternité. Parce que je devais accepter que ça se pouvait d’aimer à nouveau comme j’aimais ta grande sœur. Parce que.
Il y a les premiers poupons qui font naître toutes ces émotions contradictoires. À eux seuls, ils réalisent notre grand rêve de maternité, mais transforment à jamais notre réalité. Il y a les fœtus qui remplissent doucement l’espace entre l’utérus et le cœur. On les projette dans nos existences dès les premiers signaux. Et il y a toi que j’ai enfoui sous des vêtements amples jusqu’à six mois. Toute la tendresse que je barricadais derrière la peur a surgi en trois poussées. Le baromètre à émotion a explosé. Avant toi, je n’avais jamais cru au coup de foudre, adorable bébé miracle!
Je ne voulais pas que tu sois. J’avais épuisé ma réserve d’espoir pour ta fratrie de petits anges. Je refusais que tu me brises le cœur, si fragilement rapiécé. Mais malgré ces aveux, ne doute jamais de mon amour. Doute de ma foi, de mon courage, mais jamais de mon amour!
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