J’ai le goût de te comprendre, de te connaître vraiment, de savoir ce que tu penses, ce à quoi tu rêves.
Je serai toujours ta maman, mais j’aimerais ça des fois, qu’on puisse être seulement des amies. J’aimerais ça qu’on se parle, qu’on se fasse confiance.
J’ai envie de te câliner encore, de te chouchouter, comme je l’ai fait pendant des années. T’as dormi contre moi pendant ta première année de vie. J’aimerais que tu puisses plonger profondément dans ta mémoire, nous revoir à la maternité. Constater toutes ces fois où j’ai pleuré de joie en t’observant. Toutes les fois où je t’ai dit merci d’avoir fait de moi ta maman. D’avoir fait de moi une maman.
Au retour de la garderie ou de l’école, tu t’agrippais à ma jambe et me poursuivais partout dans la maison. Notre relation a toujours été tellement intense! Comme si t’avais toujours craint que je me sauve! Que je t’abandonne! Mais je ne l’ai jamais fait. Jamais! J’ai toujours été là! À pogner les nerfs. Trop souvent! À crier, à te maudire, à te blesser. À dire des choses vraiment abominables qu’une maman ne devrait jamais dire à son enfant. Mais je suis là aussi pour m’informer, pour me former sur le fonctionnement de ton cerveau singulier. Pour comprendre ce que je peux faire pour t’aider. Pour te comprendre. Pour demander de l’aide. Pour chercher des outils. Dans l’espoir de devenir une meilleure maman pour toi. Nous rencontrons des spécialistes depuis des années.
Je suis là pour t’écouter quand tu ne veux pas me parler. Pour consoler les gros chagrins que tu refuses de laisser couler. Ceux qui se transforment en angoisse et en colère. Maudite colère qui prend toute la place! Il y a juste deux émotions qui t’habitent! Mais avec quelle force!! T’es soit excessivement heureuse, voir euphorique, ou tellement en colère que tu disjonctes complètement et fais des crises monstres.
On se ressemble tant ma chérie! Avec le temps, j’avais appris à gérer mes émotions. Et puis, t’es arrivée. Tu m’as tout désappris.
Je voudrais tellement qu’on bâtisse quelque chose de beau toi et moi! T’as quatorze ans. Tu es officiellement une teenager depuis treize mois. T’auras de plus en plus de droits. Tu pourrais te faire avorter sans m’en parler. Sous peu, tu pourras conduire un véhicule et avoir la vie d’un tas de citoyens entre tes mains. T’auras de plus en plus d’occasions de t’éloigner de moi, de creuser le fossé entre nous. Fataliste, je perçois l’adolescence comme un point de non-retour. Même pour des enfants proches de leurs parents, cette période oblige une distance. Pour mieux créer son identité propre. Imagine lorsqu’il y a déjà un mur entre une fille et sa mère! Le temps est compté petit volcan! Je t’ai tricoté il y a bientôt quinze ans. Maintenant, il faudrait se tisser une relation suffisamment solide pour résister au temps.
Lorsque mon petit poussin devenue grande prendra son envol, je voudrais qu’elle se bâtisse une vie à sa mesure, mais qu’elle conserve l’envie de visiter ses origines. Qu’elle se redépose fréquemment sur notre branche.
Par Benoit Beaulieu-Forget - 28 juin 2017
Si j’aborde le développement affectif de l’enfant, alors que je m’adresse au papa et à ses émotions, c’est qu’en comprenant
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