Si t’avais peur des monstres, du Père-Noël ou des loups, je pourrais te prouver qu’ils ne se cachent pas sous ton lit, qu’il s’agit d’oncle Mathieu déguisé ou que la réputation du célèbre canidé est franchement surfaite. Mais t’es terrorisée par les microbes, les virus, la guerre, les catastrophes naturelles, les morsures de chien, l’inconnu, l’avenir, l’échec…Tout t’effraie, depuis toujours. Je ne sais pas comment te protéger de la vie. Et comme parent, peut-on vraiment le souhaiter? On rêve de voir notre gamin s’épanouir, découvrir le monde, se découvrir…Nous ne voulons surtout pas le conforter dans ses peurs.
Je tente de relativiser les risques que tu perçois sans invalider ton sentiment. C’est facile dans les livres, les discussions sur la parentalité bienveillante, en théorie. Mais dans la vraie vie, quand le bébé t’a réveillée aux deux heures, que Fiston maugrée parce qu’il n’a pas le goût d’aller à l’école et que toi, t’angoisses parce que je risque de passer te chercher un peu plus tard, sans pouvoir te donner l’heure exacte, il est possible qu’un « Qu’est-ce ça peut ben faire 15 minutes de plus ou de moins? » m’échappe. Ça se peut que lorsque j’attends, dans un champ, pas de réseau, avec mes quatre enfants, parce que mon conjoint est parti avec la voiture et la remorqueuse, et que t’es sur le point de faire une syncope parce que nous mangeons des framboises sauvages qui pourraient être empoisonnées par du pipi de raton laveur rageux, je te gueule « De quoi je me mêle! Manges-en pas pis laisse-nous tranquilles! ». Possible que dans ces conditions pour le moins désagréables, ma réserve de patience soit trop basse pour calmer ton anxiété lorsque tu me bombardes de questions sur l’avenir de la voiture et de notre voyage. Ça se peut que dans mon répertoire d’interventions, la seule de disponible à ce moment-là soit « T’es fatigante! Comment tu veux que je le sache, j’ai pas de réseau. »
Quand t’étais minuscule et que le bœuf en plastique de la crèche géante t’effrayait, je pouvais te jurer qu’il n’allait pas te mordre. Ça te rassurait pas pantoute parce que tu ne saisissais pas encore les mots. Mais je te serrais contre ma poitrine pour étouffer la peur. Aujourd’hui, t’es grande et très douée avec les mots. Tu saisis tous les maux de la terre et tu les places sur le bord de ton chemin. Ta voie ressemble à une course à obstacles. Tu rédiges et colles des notes afin de ne rien oublier. T’engueules tous ceux qui sont sur ton chemin et qui pourraient te mettre en retard pour l’école. Et s’il y avait une panne de métro? Tu prends quand même le temps de regarder dans ma voie pour être certaine que je n’oublie rien non plus. Et dans celle de ta petite sœur. Elle est encore jeune pour penser à tout. Et dans celle de ton frère. Pour toutes les fois où il t’énerve, t’aimerais tant le prendre en défaut. Et le bébé, il n’aura pas trop chaud habillé comme ça? T’as plus de préoccupations qu’un premier ministre mais t’as la capacité organisationnelle d’une gamine de 12 ans. Résultat? T’as omis de consulter ta note de rappel et t’as pas tes baskets pour la gym. Tu connais la température exacte pour chaque heure de la journée, mais ça t’a mis en retard. Finalement, souhaitons qu’il y ait une panne de métro pour te servir d’excuse.
Ta volonté de tout prévoir, de tout savoir et d’anticiper te joue de vilains tours. Ta surorganisation te désorganise. Crois-moi, je sais de quoi il en retourne! Ton attention n’est jamais concentrée au même endroit. Elle s’évapore à une vitesse folle pour aller se déposer là où d’autres se trouvent déjà.
Tu apprends à assembler des casse-tête avec des 5000 morceaux. Tu seras souvent perdue. Tu travailleras toujours plus fort et plus longtemps que les autres. Tu feras de nombreuses erreurs. Mais le jour où tu réussiras, tu seras la reine du casse-tête.
Ton angoisse et ton cerveau éponge te rendent la tâche bien difficile pour le moment. Je manque souvent de patience parce que tu me rappelles la fille que j’étais. On reçoit de l’aide depuis plusieurs années déjà. Pour t’apprendre à dompter l’anxiété et à recadrer ton attention. Lorsque tu y parviendras, tes grandes capacités d’analyse et de planification se transformeront en forces incroyables. Toi, papa et moi travaillons ensemble afin que tu deviennes la meilleure version de toi-même.
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