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On déménage. Comment gérer et faciliter le déménagement pour la famille?
Le déménagement implique que l’on s’aventure dans l’inconnu ! Chacun devra découvrir de nouveaux repères physiques et sociaux. L’univers familier se défait et disparaît dans des boîtes. De plus, on se sépare des amis proches, du quartier, du voisinage et des ressources connues. Tout cela peut occasionner du stress! Et si, en plus, les causes du déménagement sont stressantes (perte d’emploi d’un parent, séparation du couple, chômage, etc.), l’expérience du déménagement pourra être encore plus traumatisante, surtout pour l’enfant. Il va falloir construire une nouvelle vie ailleurs et bien accompagner l’enfant. S’il est bien préparé à ce changement, ce sera plus facile!
Comment les enfants vivent le déménagement ?
Pour les bébés et les tout-petits, l’environnement est moins important que la relation aux parents. Ils réagissent donc plus au stress qu’ils perçoivent de leurs parents qu’au changement de logis comme tel.
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Les bambins, quant à eux, sont attachés à des objets, des odeurs, des couleurs. Il est recommandé d’en tenir compte dans la réinstallation. Ils sont aussi sensibles à la réaction des parents, aux émotions vécues lors de ce changement.
Les enfants de 7 à 12 ans ont plus de ressentis difficiles car ils perdent des liens d’attachement à leurs amis. Ils doivent reconstruire leur réseau social à un âge où la socialisation est bien importante. Eux aussi perçoivent l’attitude des parents et y sont sensibles.
Quels sont les signes de stress observables chez les enfants ?
Le stress se manifeste sous plusieurs formes :
- Des troubles de l’alimentation (refus de manger ou au contraire, boulimie)
- Des troubles du sommeil (difficulté à s’endormir, cauchemars)
- Des régressions (propreté, autonomie, langage, peur de se séparer de ses parents)
- Des changements dans le tempérament de l’enfant (crises de colère, agressivité, maux de ventre, isolement, nervosité, inquiétude, anxiété, dépression)
- Des larcins ou autres gestes déplacés.
Comment intervenir pour aider l’enfant ?
- Dire la vérité. Prévenir. Dire à l’avance ce qui va se passer. Parler du renouveau à venir. Parler des avantages du déménagement. Parler de ce qui demeurera pareil et ce qui changera. Démontrer qu’on ne va pas tout perdre. Éviter les mensonges. Faire un calendrier pour situer le déménagement dans le temps et en parler fréquemment.
- Verbaliser les émotions de l’enfant et les vôtres. Reconnaître les émotions vécues : peur de l’inconnu, insécurité, crainte, inquiétude, ennui, anxiété, stress, tristesse, solitude, isolement, etc. Comme ces émotions sont négatives, elles sont plus difficiles à vivre. Bien soutenir l’enfant et partager avec lui ses propres émotions sans reporter sur lui ses angoisses.
- Confectionner une boîte de souvenirs de l’ancienne demeure. (photos de la maison, des amis, du quartier, du service de garde, de l’école, petits objets qui rappellent des souvenirs). Dialoguer avec l’enfant en évoquant des souvenirs. Confectionner un cahier souvenirs où les amis peuvent écrire un mot ou une pensée.
- Permettre à l’enfant de jouer le déménagement. (figurines, maisons en jouets, camion de déménagement, écoles en jouets, services de garde en jouets, etc.)
- Encourager la lecture de contes et d’histoires sur le déménagement. Des livres d’enfants sont suggérés dans les références avec un petit commentaire. Ces lectures reflètent l’expérience vécue par l’enfant lors du déménagement, ouvrent la porte pour le dialogue. Cela devient une biblio thérapie.
Catherine Dolto et al, Changer de maison, Éditions Giboulées Gallimard Jeunesse, 2007 (adapté pour les enfants de 4 ans et plus. Ce livre présente plein de bonnes idées pour faciliter l’adaptation de l’enfant)
Katia Canciani, Girofle déménage, Éditions Rat de bibliothèque, 2010. (adapté pour les enfants de 7-8 ans. Ce livre présente bien les émotions vécues par l’enfant lors d’un déménagement et l’importance des liens sociaux à tisser).
Pakita, Au secours! Salomé déménage, Éditions Chabot, 2010 (adapté pour les enfants de 6 ans et plus. Ce livre fait comprendre les émotions vécues par l’enfant et le sentiment d’assurance ressenti lorsque la visite des nouveaux lieux se réalise et que l’enfant peut s’y projeter)
- Faire participer l’enfant dans la démarche selon l’âge. Visiter les nouveaux lieux avec l’enfant, la maison, le service de garde, l’école, le parc, le centre de loisirs, etc. Insister sur les nouvelles ressources qui prennent le relais des anciennes. Montrer des photos. Laisser l’enfant participer à la mise en boîtes de certains articles. Impliquer l’enfant dans la décoration de sa nouvelle chambre.
- Maintenir le plus de repères possible. Empaqueter à la fin les objets préférés et significatifs pour l’enfant pour qu’ils soient déballés en premier. Garder certains objets à portée de main pour réconforter l’enfant (doudou, oreiller, toutous, douillette, etc.). Organiser en premier lieu l’espace de jeu et la chambre de l’enfant avec des objets familiers. Tenter de recréer un environnement similaire et sécurisant. Respecter les routines et préserver au mieux les horaires (alimentation, bain, sommeil).Attendre que l’adaptation soit bien réussie avant d’entreprendre d’autres changements comme l’entraînement à la propreté, retirer le biberon, changer le mobilier de la chambre, changer de lit, etc. Si nécessaire, faire garder l’enfant par des personnes connues avec qui un lien d’attachement est déjà créé, le jour du déménagement. Si l’enfant est plus vieux et qu’il peut aider, lui confier des tâches qu’il peut réaliser de manière sécuritaire.
- Soutenir l’enfant dans sa socialisation. Organiser un goûter d’au revoir avec les copains et faciliter les liens avec eux : courrier, visite, internet, téléphone, etc. Accompagner l’enfant dans sa découverte du nouveau quartier : centre de loisirs, bibliothèque, gymnase, cinéma, maison de jeunes, etc. Se doter d’un nouveau carnet d’adresses pour inscrire les copains qu’il quitte et les nouveaux qu’il rencontre.
- Offrir des moments d’attention individuelle. Vivre des moments d’intimité avec l’enfant; lecture d’un conte, jasette informelle, promenade dans le nouveau quartier, repas au restaurant, etc. Être une présence rassurante pour l’enfant malgré toutes les occupations.
- Aider l’enfant à gérer son stress. Intégrer des exercices de relaxation, de détente, de massage, etc. Intégrer des activités physiques dans l’emploi du temps de l’enfant.
- Recourir au besoin à des ressources professionnelles. Si les symptômes de stress perdurent chez l’enfant, consulter un professionnel de la santé mentale (pédopsychiatre, psychologue pour enfants) pour obtenir de l’aide.
Par Jocelyne Petit, Docteure en Sciences de l’Éducation.