On dit : « Mettre au monde ».
C’est beau ça.
Beaucoup plus que « donner la vie », je trouve.
Parce que ça, ce serait comme de te dire que tu m’es redevable de quelque chose.
« Je t’ai donné la vie, alors donne-moi en retour. »
C’est bien lourd à porter pour des épaules aussi petites que les tiennes.
« Mettre au monde », c’est immense. C’est ouvert et plein.
Et, surtout, ça te laisse maître de la suite.
Parce que c’est ça qui s’en vient mon grand.
Ce sera toi qui décideras de ce que tu en feras de cette mise au monde là; de ce que tu en feras de ce gros mandat-là d’être quelqu’un parmi d’autres. Tu es trop petit encore pour que je puisse envisager ce que tu deviendras, mais du haut de tes deux ans et demi, je sais déjà que tu aimeras démesurément. Visiblement, je t’ai transmis mon absence de nuance et mon intensité-vraiment-too-much. Je le vois dans tes yeux, je le sens dans ton grand cœur, déjà. Et tu sais quoi? Tant mieux. Parce que Être et Aimer, c’est pas mal les deux seules affaires qui comptent réellement.
Il n’y a rien de pire que quelqu’un qui donne des conseils sans qu’on le lui demande.
Mais saches mon garçon qu’il y a une chose, une seule chose que j’espère t’enseigner, très, très, très fort.
Sois.
Existe.
Et surtout : fais-le comme tu veux.
Très bientôt, tu te rendras compte que je ne comprends pas tout; que je suis un peu toute croche, que je doute de tout, que j’ai pas mal plus de questions que de réponses, et que je n’ai aucune idée du monde dans lequel je t’ai lancé. Ni de la vie que tu y auras.
Je ne sais pas de quoi le monde aura l’air pendant ta vie à toi, mais je sais que j’essaierai de t’y accompagner le plus longtemps possible.
Je suis loin d’être détentrice de la vérité absolue (d’ailleurs, méfie-toi toujours de ceux et celles qui ont une opinion sur tout), mais je sais une chose. Ce qui restera, au final, ce sera toujours ceux et celles que nous aurons aimés. Ceux et celles qui nous auront aimés.
Entoure-toi.
Aime sans nuance.
Aime bien. Sois gentil. Écoute. Et entends.
Ne juge pas sans connaître. La destination des gens, on s’en fout. C’est le chemin qui les y a menés qui importe.
Aime le vrai.
Entoure-toi de gens qui ont choisi ce qu’ils sont, qui savent être heureux et qui choisissent de l’être. Le reste suivra.
Tu sais, je n’ai pas une grosse job ni des ambitions de carrière sans bon sens.
Mais j’ai la chance inouïe d’avoir un travail que j’adore parce que je l’ai choisi. Parce que je me suis écoutée. Parce que j’ai décidé de faire ce que mon cœur disait.
Je n’aurai peut-être jamais la voiture de l’année.
Mais j’ai l’immense privilège d’avoir beaucoup d’amis.
Et je ne te parle pas d’amis Facebook. Je te parle de ceux que j’aime plus grand que tout, pour qui je ferais le tour du monde en kayak sans rame à 3 h du matin no matter what, qui rient de mes jokes plates, qui ne se tannent pas de mes interrogations sans fin, qui me connaissent dans tout ce que j’ai de plus weird, et qui m’aiment malgré tout. Ou grâce à ça peut-être.
Tu me vois venir là hein? Ben oui. Je vais te la sortir la Quétainerie avec un grand Q : la vraie richesse mon gars, c’est ça. C’est ce que tu es. La place que tu te donnes. Et ceux avec qui tu choisis d’être.
Alors, sois, mon beau grand garçon d’amour.
Mon conseil à deux cennes, c’est juste ça.
Sois.
Va là où tu veux aller, sois là où tu veux être quand tu veux y être, essaie, ose, et tente de descendre avant d’avoir mal au cœur. Parce que des fois, ça fait ça, aimer. Et si jamais ça arrive, si jamais tu as le tournis et que tu ne trouves pas la sortie, je te promets d’être là. Avec mes conseils psychopop cul cul la praline et mon envie de te sauver de tout, avec tout ce que je suis et tout ce que je ne suis pas, mais surtout, je te promets d’être toute là. Même si je ne comprends pas tout.
Sophie Vaillancourt-Léonard
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