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Cher hiver, je suis enceinte et je te déteste
Ma première montée de lait hivernal, qui fait plutôt office de sorbet avec la température qui frappe la région depuis quelque temps déjà. Quand on planifie l’arrivée d’un bébé, ou du moins que l’on tente de le faire, les avis sont partagés quant à la saison la plus accommodante pour vivre sa grossesse. La chaleur accablante de l’été ou le grand froid polaire de l’hiver?
Le hasard a décidé que j’allais vivre la majorité de ma grossesse dans le froid, apprenant qu’une vie poussait dans mon ventre à la fin août, j’approche maintenant de mon troisième trimestre à la fin janvier et je maudis hargneusement l’hiver avec autant d’énergie que de mauvaise foi.
D’abord, soyons clairs, être enceinte l’hiver c’est vivre dans l’impuissance. L’impuissance d’avoir peur de glisser dès que l’on met le pied dehors, l’impuissance des trajets difficiles sur les routes enneigées. L’hiver, c’est comme un film de fin du monde à gros budget, c’est impressionnant sur l’écran, mais on a zéro envie de participer à l’action. À l’heure actuelle, j’en veux au monde entier, j’en veux à mon manque d’énergie, à mon corps beaucoup trop endolori, à mon chum de pas le vivre à ma place, à mon auto de ne pas être un gros camion, à la neige d’être si froide, à mes voisins trop antisociaux pour savoir que je suis enceinte et qui ne proposent pas de m’aider avec le déneigement, à mes patrons d’avoir installés le bureau si loin de chez moi, à ma ville de ne pas prévoir une déneigeuse pour chaque rue, à tous les automobilistes du Québec de ne pas savoir conduire, à mes parents d’avoir choisi de vivre au Québec, au gouvernement de ne pas avoir confectionné un immense dôme anti-neige au-dessus de la province! Bref.
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Dernièrement, le Québec entier a essuyé sa première grosse tempête de neige de la saison et petite madame enceinte s’est retrouvé seule à la maison avec sa grosse bedaine et un conjoint bloqué au travail pour la nuit à cause d’une autoroute fermée. Je lui ai dit que j’étais soulagée qu’il soit en sécurité, mais au fond, j’avais juste envie de lui demander qui allait déterrer mon auto pour que je puisse aller travailler le lendemain matin! Mais que veux-tu qu’il fasse le pauvre ti cœur? Sans compter que c’est toujours à cet instant que tu réalises qu’il n’y a plus de lait ni de beurre dans le frigo. Vient ensuite la question : est-ce que je me prends d’aventure à affronter cette forteresse de neige enceinte de pratiquement 6 mois? Plusieurs mères me diront « Pas de problème, fille! », mais moi je connais une fille qui a fait une fausse couche en passant la tondeuse, alors je me fais des scénarios, comme toute femme enceinte normalement névrosée. J’appelle donc ma mère qui me conseille d’y aller, mais sans lever de charge… Bon plan. Ma nouvelle option est de déterrer mon auto en soufflant sur la neige.
Finalement j’y suis arrivée, avec un mal de dos, un mal de gorge, peut-être un doigt en moins, la (fausse) conviction de savoir ce que vivent les mères célibataires et avec une bonne une dose de mauvaise foi hormonale et de haine pour chacun de ces flocons qui me narguaient en me fouettant le visage. Pas foutus de tomber en jolis tapis blanc pour Noël et maintenant ça nous tombe dessus en oubliant de passer par l’automne. Mère nature a développé un TDAH.
Cher hiver, pour conclure, sache que je me promets aussi de te détester l’année prochaine, lorsque je devrai me procurer un kit d’hiver pour bébé qui ne fera qu’une saison, que je devrai jongler avec l’habit de neige entre deux changements de couche ou quand il faudra que je m’engage sur les routes glissantes avec mon précieux bébé à bord. En attendant, continue de souffler dehors, pendant que je rumine mon amertume devant un bon feu de foyer, avec une grosse couverture, un épisode de la série Gilmore Girls et un bol de soupe aux pois.
Rédaction :
Claudie Hinse
Mise à jour : 25 janvier 2019
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