Je n’avais jamais songé à la manière dont la maternité pourrait m’affecter ou faire émerger une partie de moi que je ne connaissais pas. J’ai entendu parler de femmes qui changeaient après avoir eu un enfant, qui devenaient plus épanouies ou plus protectrices. Je conçois que la maternité peut nous changer, altérer notre vision de la vie et de ce que l’on en attend. Enceinte, j’avais peur de devenir un cliché de femme émotive et beaucoup trop angoissée pour des détails sans importance. C’est le contraire qui s’est produit : je me suis découvert une belle sérénité et un laisser-aller qui ne me ressemble pas tout à fait. Mais le changement qui m’a le plus surpris a été cette incompréhensible envie de dépenser.
Ceux qui me connaissent savent que je suis plutôt du genre économe : je choisis volontiers des vacances sous la tente plutôt que dans un hôtel de luxe, la paire de jeans à 30 $ plutôt que le pantalon de lin à 100 $. Je planifie mes dépenses, j’évite les dettes et je fais des budgets pour tout. D’ailleurs, avant d’avoir un enfant, j’avais planifié plusieurs scénarios financiers pour le futur, calculant les économies possibles et les imprévus potentiels. Je prévoyais faire les ventes de garage, trouver des vêtements usagers sur internet, ne pas accumuler plus que nécessaire, privilégier l’essentiel. Jusqu’à ce qu’un drôle de déclic se produise en moi au cours de mon troisième trimestre.
Est-ce que ce sont les hormones? Un gène mystérieux de la maternité? Le même qui permet aux mamans de tout savoir et de retrouver tout ce qui est perdu? J’ai un bébé qui pousse dans mon ventre, qui gigote, qui se tourne, qui pousse sur mes hanches et j’ai cet incompréhensible besoin de le gâter. Ce petit être qui ne voudra que boire et être câliné pendant les premiers mois de sa vie, qui ne demande rien à personne. J’ai la soudaine impression que les tissus ne seront jamais assez doux, les jouets jamais assez distrayants, qu’il manquera toujours quelque chose. J’achète de petits ensembles à la Instagram alors que ma logique comprend tout à fait que ces vêtements, qui ne lui feront pas plus de quelques mois, seront rapidement tachés de vomi, de lait ou de tout ce qui peut s’échapper d’une couche.
Est-ce que c’est l’impatience de l’attente? Je ne peux rien faire donc je dépense? J’ai refait le sac d’hôpital au moins cinq fois, les tiroirs de la commode sont bien garnis, les biberons sont désinfectés. Est-ce qu’acheter cette veilleuse ou cette couverture en mousseline me rendra plus prête? J’écris ce texte avec une pointe d’autodérision, parce que je me trouve ridicule, mais aussi avec un peu d’angoisse. Plus la date d’accouchement approche, plus je découvre que ma belle sérénité s’effrite et, en écrivant ces mots, je commence à deviner l’angoisse sournoise qui se cache derrière mes travers. Est-ce que mon bébé va m’aimer?
Quelle peur ridicule. Mais pourquoi je sens mes yeux qui brûlent en l’écrivant? Est-ce que je tenterais d’acheter l’amour de mon bébé avant même qu’il pointe le bout de son petit nez tout innocent? Est-ce que je saurai être une aussi bonne mère que la mienne l’a été pour moi? Est-ce que je serai à la hauteur? Est-ce que je vais crouler sous la pression imaginaire que je me crée?
Sors vite pour que je puisse te tenir dans mes bras, petit bébé. Que je puisse te donner tout ce dont tu as besoin. Que je puisse apprendre à te dire non, parce que je ne voudrai que ton bien. Que je puisse apprendre de mes erreurs, que je puisse contrôler mes angoisses, que l’on puisse grandir ensemble, toi, moi et ton papa.
Je t’aime déjà si fort.
Par Équipe Vie de Parents - 28 juin 2017
… il y a […] quelques options intéressantes pour vous informer sur la naissance, ce qui pourrait se passer et
Lire l'article