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One more time
Mes enfants ont jamais demandé à vivre. Non, mais c’est vrai. Je les trouve hots. Je les regarde se débrouiller. Avec la vie je veux dire, avec l’existence. Ma fille partage ses réflexions sur le monde, elle dit “je t’aime”, elle danse dans le salon sur One more time de Daft Punk (Qu’elle appelle Une montagne), pis elle a juste deux ans et demi. Y’a deux ans et demi, elle n’était même pas au monde. C’est pas long, deux ans et demi, dans un espace-temps adulte occupé et distrait. C’était avant-hier.
Tout ça, c’est de ma faute.
J’ai cet espèce de sentiment étrange qui oscille entre fierté et culpabilité quand je pense à ça.
Une des premières fois où ça m’a traversé l’esprit, c’est quand j’observais mon garçon quand il avait un an ou deux, et que j’ai réalisé que quelque soit le vêtement que je décidais de lui mettre, il le mettait. J’aurais pu vraiment lui mettre n’importe quoi, il s’en foutait. Ça va probablement vous paraître anodin, mais moi, ça me touchait profondément. Cette vulnérabilité là. Cette façon là qu’ont les enfants (en général) d’accepter la réalité et de juste plonger, d’essayer, d’expérimenter. De nous écouter. Je veux dire, j’aurais pu l’élever n’importe comment. Décider que lui, il parlerait une nouvelle langue en bruit de pet, qu’il porterait juste des jumpsuit argent avec du glitter, qu’il devrait prier sept fois par jour et faire des offrandes à Cthulhu le Grand Ancien qui vit au centre de la Terre, et il l’aurait fait.
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Ti pet.
Je veux tellement qu’ils soient heureux. Qu’ils soient bien. Je sais que c’est impossible de leur éviter d’avoir mal, que c’est même malsain de vouloir les protéger de tout parce que ça fait juste les rendre anxieux. Même que ça ferait d’eux des êtres humains probablement très désagréables et inintéressants. Mais instinctivement, je le souhaite pareil. Des fois, j’ai peur de les élever tout croche. Des fois, j’ai peur de leur transmettre des bibittes mentales. Des fois, je me dis merde, ils sont pognés avec moi. Merde, il va arrêter de m’aimer, je l’ai chicané trop fort. Il me trouve plate. Il me trouve trop pauvre, je peux pas lui payer un voyage à Disney World ou une trampoline.
Ben non. Pour eux, on est le bout de la marde. Ils veulent tellement nous plaire, ils veulent tellement qu’on les aime.
One more time, je regarde mon garçon enfiler ses vêtements chauds et filer vers l’autobus dans la pluie frette d’octobre. Il a pas décidé tout ça. D’être là. D’avoir à faire ça. Mais il fait face à la musique. Pis je le trouve beau.
Nicola Vachon
Rédaction :
Nicola Vachon
Mise à jour : 18 octobre 2019
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