Fin juillet. Je suis au travail. Comme chaque matin depuis une semaine, je m’assois devant mon ordinateur, un secret au creux de mon ventre.
Il est 10 h et, la tête légère, j’ignore encore complètement de quoi sera faite ma journée.
Jusqu’à ce moment où une hideuse crampe prend soudainement possession de mon corps. Le genre qui nous force à nous plier en deux, poitrine contre genoux.
Je suis immobile…
Je me tourne pour confirmer ce que je redoute. Une tache se forme sur ma robe, des larmes coulent sur mes joues. J’ai mal. Au ventre, mais surtout à mon cœur, égratigné.
À l’hôpital, l’air est glacial. Je tente de calmer mes tremblement, d’étouffer mes sanglots et d’ignorer les regards.
Après huit heures à espérer en vain entendre mon nom, mon conjoint et moi décidons de quitter les lieux pour rejoindre notre petit d’un an à la maison.
Nous partons, sans savoir si je porte encore la vie en moi.
Le doute insupportable plane tout le weekend…
Lundi matin, la gorge nouée, mes yeux sont fixés à l’écran du moniteur d’une clinique dans laquelle j’ai réussi à obtenir un rendez-vous rapidement. Je ne cligne pas des yeux; je sais que les prochaines secondes seront déterminantes.
Et là, à ma plus grande surprise, j’ai droit au plus beau dénouement qui soit : un minuscule point clignote à l’écran.
Mon bébé est encore là, en vie.
On m’informe que j’ai « seulement » un décollement placentaire.
Après trois semaines d’arrêt de travail, à espérer, désespérer, puis encore espérer, mon cœur s’apaise : une seconde échographie me confirme que, malgré tout, bébé tient le coup.
Ce soir-là, j’annonce la bonne nouvelle à mes proches : on va avoir un deuxième bébé!
La semaine d’après a lieu mon premier rendez-vous officiel chez le médecin, celui où on tentera d’écouter le cœur.
Je suis fébrile. Le froid de la gelée saisit mon ventre et le doppler fait les 100 pas sur ma peau.
Encore.
Et encore.
Je retiens mon souffle.
Je n’ai pas le bonheur d’entendre le cœur de bébé.
Rien d’inquiétant, me dit-on. Bébé est encore petit, alors il peut être normal qu’on ne perçoive pas ses battements avec l’appareil.
Je désenchante, mais j’essaie de rester positive.
Je passe la fin de semaine à googler des histoires comme la mienne jusqu’à ce que j’en trouve qui finissent bien, question de me remonter le moral.
Le lundi suivant, mon corps sait qu’il y a quelque chose qui cloche. J’ai mal à la tête, je frissonne et le peu d’espoir qui me reste disparaît avec la vue de nouveaux saignements.
Le verdict tombe quelques jours plus tard : plus rien ne scintille à l’écran.
Juste une petite silhouette immobile.
Un brin de bébé pas plus gros que celui qui m’avait fait sourire il y a sept jours. J’apprends donc que c’est le bedon sans vie que j’annonçais à mes amies ce que je croyais être une bonne nouvelle…
Fin août, le fœtus apparaît sous mes yeux, dans la froideur de ma salle de bain.
Le jour de mon curetage a lieu la journée à laquelle était prévue mon échographie de douze semaines. Je m’enregistre, entourée de femmes aux ventres arrondis. Je tiens un précieux contenant entre mes mains, que je remets en larmes aux infirmières. Pour la science…
Début septembre, Je pense à tort que le chapitre de ma fausse couche est terminé et je calcule déjà à quel moment mon conjoint et moi pourrons recommencer les essais.
Mais l’automne s’installe et mes règles ne s’interrompent pas.
On détecte alors que mon taux de HCG est encore enlevé, comme si j’étais enceinte. Conclusion : des restants de la fausse couche sont coincés à l’intérieur.
L’année se termine avec des prises de sang hebdomadaires, des rendez-vous de suivi ponctués de manipulations douloureuses et beaucoup trop d’heures d’attente entourée de futures mamans rayonnantes. Je ne veux alors que tourner la page. Passer à autre chose.
Je débute la nouvelle année en apprenant que mon taux de HCG est enfin à zéro.
Suite à mon curetage, il aura donc fallu quatre mois pour que mon taux revienne à zéro. Et un mois de plus pour que mes règles infinies arrêtent. Une aventure qui aura duré sept mois à partir du test positif.
Mais un an plus tard, presque jour pour jour, j’ai finalement revu deux belles lignes roses côte à côte.
J’ai fait un autre décollement placentaire pour cette grossesse, mais cette fois, l’histoire s’est terminée de la plus belle des façons : avec un bébé arc-en-ciel des plus calmes et craquants.
Si j’ai eu envie de raconter mon histoire, c’est surtout parce que je me sentais bien seule dans cette rare situation de fausse couche interminable lorsque je fouillais sur Internet soir après soir…
Il m’arrive souvent de repenser à ces moments difficiles qui sont encore bien frais dans ma mémoire. Après tout, ils font partie de mon histoire et de celle ma famille. Mais je ne pourrais être plus reconnaissante de la chance que j’ai d’être enfin maman x 2.
Par Équipe Vie de Parents - 12 septembre 2017
La fausse couche est un arrêt naturel de la grossesse.
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