Devenir parent est merveilleux. Les changements occasionnés par l’arrivée d’un enfant peuvent toutefois être spécialement déstabilisants pour le couple. Certaines études indiquent qu’un couple sur quatre se sépare dans les quatre années qui suivent la naissance d’un enfant et que 50 % de ces séparations surviennent au cours des sept premières années de vie commune.
Les recherches démontrent cependant que les parents qui maîtrisent les défis liés à cette nouvelle réalité, qui conservent une relation de qualité et qui se soutiennent mutuellement dans leur rôle de parents accroîtront leur satisfaction conjugale. Il est de plus démontré que cette collaboration parentale participe positivement au développement socio-affectif de l’enfant. La question qui tue : comment surmonter ce défi qui frappe de plein fouet les couples?
Moi Hugues Simard, psychologue spécialisé en thérapie de couple et comptant plus de sept années de formation universitaire en psychologie, je dois avouer que l’arrivée de mon enfant a été une période difficile pour mon couple. Je me croyais bien préparé, bien outillé et bien conscient des défis. Et pourtant! J’ai frappé le mur comme beaucoup de parents.
Une fois rétabli, je me suis fortement intéressé à cette ère de transition que vivent les couples. Une grande partie de ma clinique en thérapie de couple est maintenant consacrée aux nouveaux parents, en partie parce que les difficultés de couple sont trop souvent mises de côté pendant la période post-natale. Oui, avoir un enfant est merveilleux, mais c’est plus ardu que de s’occuper de soi.
La vie familiale (voire parentale) est sensiblement plus exigeante que la vie à deux. Nous devons nous déposséder et refuser de répondre à plusieurs de nos besoins personnels, ce que nous n’avons pas nécessairement intégré au cours de notre développement personnel. Nous avons appris à partager, à rendre service, à aimer, à pardonner et bien d’autres gestes encore, mais se priver?
Avouons-le, ce n’est pas un concept très à la mode dans une société axée sur la consommation accompagnée d’une montée flamboyante de l’individualisme. Je veux être très clair : avoir des enfants est tout un défi. Nos grand-mères n’avaient pas autant de difficultés que nous, mais la société était alors très différente. Nos modèles familiaux se sont complètement métamorphosés au cours des dernières décennies; il s’agit d’un changement majeur, probablement même une première depuis les débuts de l’humanité.
Il est primordial d’être indulgent envers nous-mêmes et notre couple et d’accepter que cette période soit laborieuse.
Les défis de la parentalité sont nombreux. On peut les regrouper ainsi :
La personnalité ou l’état de santé de l’enfant influe grandement le bien-être conjugal. Si vous avez un enfant « facile », un bébé en santé qui fait ses nuits, il est possible que votre état de stress soit plus bas que chez les parents dont l’enfant présente des besoins beaucoup plus importants.
La première année de vie de votre enfant est assurément la plus difficile. Tout est nouveau et change vraiment vite. Les nuits sont courtes, les inquiétudes plus présentes et la fatigue accentue ces problématiques. La fatigue est un facteur appréciable dans les conflits de couple, pus qu’une personne fatiguée est forcément plus irritable, plus sensible et a tendance à amplifier les problèmes. Imaginez maintenant qu’on double la mise : deux personnes fatiguées et un enfant qui ne pense qu’à lui ; nous avons là un mélange parfait pour rendre des relations de couple tendues et conflictuelles.
Un enfant exige beaucoup de sacrifices de ses parents. C’est un petit être extraordinaire, mais qui consacre les premiers mois de sa vie à lui-même. Il se moque complètement que vous ayez faim, que vous soyez fatigué ou que vous soyez tanné. Il a faim? il a mal? il est fatigué? il sait parfaitement exprimer son mécontentement. C’est parce que vous êtes de très bons parents que vous allez ignorer vos besoins pour vous consacrer aux siens.
Le sexe… ce mot ancien pour désigner la période où l’homme et la femme se retrouvaient pour échanger des moments de tendresse et se rapprocher. Je rigole! Mais selon les statistiques, une proportion importante de couples rapporte une diminution de l’activité sexuelle lors de la période de transition vers la parentalité. Cette diminution peut s’expliquer par les facteurs suivants :
D’autres données démontrent que le tiers des couples ayant eu un bébé juge par la négative cet aspect de leur vie conjugale et les problèmes seraient plus importants dans les trois à quatre ans suivant la naissance de l’enfant. Pour de nombreux couples, ces défis semblent liés à des différends conjugaux ayant débuté avant même la grossesse. Notons, encore une fois, que cette situation ne touche pas l’entièreté des couples qui deviennent parents.
Selon certaines études, neuf mois après la naissance de leur enfant, la flamme du désir ne s’est pas rallumée chez 35 % des femmes. Après un an, un couple sur 10 n’aurait pas encore refait l’amour. Dans certains cas, c’est l’homme qui tarde à retrouver le désir, par exemple lorsqu’il est resté traumatisé d’avoir assisté à l’accouchement.
Il est donc primordial selon moi de consulter un ou une sexologue pour trouver des solutions et ne pas laisser aller votre vie sexuelle à la dérive. N’oubliez pas qu’un couple sans sensualité et sexualité est simplement la rencontre de deux bons amis. La sexologue Véronique Larivière mentionne que la sexualité évolue tout au cours de notre vie et que l’arrivée d’un enfant modifie considérablement les habitudes sexuelles.
Toujours selon Véronique Larivière, il est important de consacrer du temps de qualité à son partenaire. Pour commencer, il faut penser à la façon de mettre sa relation en priorité. Voici quelques idées qui peuvent aider les couples à nourrir leur flamme :
Accomplissez à deux certaines corvées, et même si ce n’est pas très romantique ni amusant, vous serez ensemble. Le partage de tâches peut inclure des activités comme magasiner, plier le linge propre, donner le bain au bébé etc;
Restez en contact, rapprochez-vous en vous tenant la main, en vous massant les épaules, en vous faisant des câlins… le contact physique est agréable et accroît les endorphines, des hormones favorables aux rapprochements;
Faites savoir à votre partenaire que vous l’aimez, en lui écrivant un mot et en ne laissant sur son oreiller, dans sa boite à lunch ou dans son porte-documents;
Réservez-vous des surprises, vous ferez sourire votre partenaire et lui montrerez que vous pensez à lui en posant des gestes simples et attentionnés, comme lui envoyer une blague par courriel, lui offrir un cadeau ou des fleurs;
N’accordez pas trop d’importance aux petites choses, peut-être que vous ne pouvez pas accomplir toutes vos tâches, et c’est normal. Est-il vraiment impératif de faire la lessive mardi soir? Ne peut-elle attendre au mercredi? Il est clair que beaucoup de choses sont insignifiantes comparativement à votre relation de couple.
Devenez une équipe du tonnerre. Au cours de ma pratique en tant que psychologue de couple, j’ai rencontré plusieurs couples qui n’arrivent plus à former une équipe après l’arrivée de l’enfant. Les partenaires qui, autrefois, partageaient tellement d’intérêts et de points communs n’arrivent plus à s’entendre sur la façon sécuritaire de fixer un siège d’auto. On dit que le couple est patriarcal et que la famille est matriarcale ; j’ai compris le sens de cette expression suite à l’arrivée de mon premier enfant. Quel choc de voir ma partenaire prendre des décisions sur presque tout, planifier, organiser, m’organiser…
J’ai compris après un certain temps que la femme est meilleure que l’homme pour évaluer et prévoir les besoins de l’enfant lorsque ce dernier est en bas âge. Je me suis donc rangé de son côté et lui ai proposé que l’on travaille avec nos forces plutôt que de mettre l’emphase sur nos lacunes. À partir de ce moment, notre dynamique de couple s’est grandement améliorée. Pourquoi tenter de faire les choses de la même façon et de chercher à changer l’autre?
Dans le monde de la psychologie du travail, il est bien connu que les équipes performantes sont celles où les membres sont complémentaires, partagent un objectif commun, communiquent de façon efficace, sont en mesure de faire des compromis, d’échanger des idées et d’adopter des processus décisionnels gagnants, leur permettant ainsi d’atteindre des résultats étonnants.
Pour garder son couple en santé à l’arrivée des enfants, il y a certainement de nombreuses façons de faire. Je me permets toutefois de vous partager quelques pistes que j’ai eu la chance d’observer au cours de ma pratique comme psychologue de couple. Voici donc cinq conseils pour préserver l’unité dans votre couple :
1) Reposez-vous
Le premier conseil que je donne aux parents qui viennent me consulter est de trouver des façons de se reposer. Les parents doivent faire équipe et se coordonner pour se reposer à tour de rôle. Il peut être très utile d’utiliser la famille ou les amis ou encore, de faire appel à des organismes communautaires.
2) Sortez de votre rôle de parent
Mon deuxième conseil est de sortir de votre rôle de parent 10 minutes par jour. Essayez de ne pas parler de votre enfant, des tâches ménagères ou des autres obligations familiales pendant ces 10 minutes. Durant les six premiers mois de mon enfant, ma conjointe regardait des photos de notre fille pendant qu’elle dormait. Elle était complètement obnubilée par elle. C’était beau à voir, mais le « nous » n’existait plus en dehors de l’enfant. Le jour où l’on a pris un petit moment pour nous, c’est là que nous avons réalisé que l’on se manquait.
3) N’essayez pas de tout régler
Le troisième conseil est de ne pas projeter trop loin ou de tenter de tout régler. Prenez une situation à la fois et tentez de trouver des solutions uniquement pour celle-ci. Il est important de commencer par une petite problématique, simple afin d’obtenir des résultats positifs pour se redonner confiance. Ne planifiez pas trop loin à l’avance, car les changements sont tellement rapides que les solutions d’aujourd’hui ne seront plus viables dans quelques semaines voire quelques jours.
4) Tenez compte du contexte
Rappelez-vous que vous être dans une période difficile, imprévisible et déstabilisante demandant beaucoup d’effort et d’énergie. Imaginez que vous êtes sur un océan dans une petite chaloupe et qu’un orage se lève : vous devriez vous unir et vous coordonner pour traverser la tempête. Si vous commencez à vous donner des coups de rames sur la tête, vos chances de survie seront très minces. Il en est de même pour votre couple. Rappelez-vous que cette période vous paraîtra moins ardue si vous êtes unis et solidaires. Soyez indulgent et développez de la compassion envers vous-même et votre partenaire.
5 ) Cultivez la fierté
La fierté est une émotion particulièrement agréable et qui vous protège de la déprime et vous donne le goût de vous investir davantage. Les parents sont fréquemment trop sévères envers eux et entre eux. Cultiver la fierté change le regard sur les situations ; elle nous permet de modifier notre attention afin de percevoir nos bons coups, nos forces et les réussites qui sont accomplies quotidiennement. C’est la première étape qui permet le renforcement de notre sentiment amoureux.
N’oubliez jamais que votre famille constitue votre plus belle réussite. Il n’est pas exceptionnel, après cette période difficile, de voir des amoureux se retrouver et ressentir un sentiment amoureux encore plus fort qu’avant. Réussir sa vie familiale a des impacts positifs sur l’estime de soi, le sentiment d’accomplissement et donne un sens différent à la vie.
Si vous avez le temps et que vous souhaitez consulter, vous êtes les bienvenus à la Clinique de Psychologie Québec. Si votre seule raison de ne pas consulter est que vous n’avez pas de gardienne, il me fera plaisir de vous accueillir avec votre nouveau-né. Après tout, il fait partie du problème.
Bon courage à tous!
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