Autrefois, l’éducation autoritaire imposait beaucoup de limites aux enfants! Docilité, soumission, écoute des consignes, respect de l’autorité, acceptation des règles sans contester, conformisme à ce qui est attendu de soi, acceptation des contraintes, discipline, obéissance, résignation, concession : autant de mots pour décrire l’approche éducative autoritaire et la position de l’enfant face à des limites dures. On « élevait » un enfant et des conséquences désagréables l’attendaient s’il transgressait les règles. Abus physiques, punitions sévères, pouvaient refroidir les ardeurs de l’insoumission de l’enfant. De nos jours, c’est tout le contraire!
De nos jours
La parentalité se veut bienveillante et positive. Les parents veulent donc dire « OUI » à leur enfant pour ne pas le frustrer ni le brimer. Dire « NON » devient plus difficile! Or, pour que l’enfant s’intègre bien à la société, il a besoin d’apprendre à respecter les limites. Il naît sans limites. Qui peut lui apprendre les limites à respecter? Ses parents, bien sûr! Il ne doit pas croire que « TOUT » est permis et croire que l’adulte endurera ses soubresauts et ses sautes d’humeur lorsqu’il manifeste ses besoins et ses désirs en criant, en griffant, en gueulant, en vociférant, en insultant, en jurant, en invalidant son parent, en l’intimidant. Lorsque « TOUT » devient recevable parce que le parent ne pose pas de limites, on en est quitte pour une crise, une crise identitaire, parce que pour développer une identité saine et s’intégrer à la société, l’enfant a besoin de limites claires et constantes. Il a besoin de modèles adultes qui font connaître leurs limites sans ambiguïté. Et comment communiquer des limites claires et fermes à l’enfant? En disant « NON » à l’enfant lorsqu’il se désorganise, lorsqu’il adopte des comportements irrespectueux, inacceptables et désagréables. En intervenant rapidement quand le déséquilibre s’installe.
Définir le cadre et s’écouter
Le parent est celui qui définit le cadre qui délimite les contours de ce qui est acceptable de ce qui ne l’est pas. Quand l’enfant outrepasse la limite, il a besoin qu’on le ramène dans le cadre pour éviter la désorganisation et l’abus de pouvoir.
Le cadre est défini par des sensations de plaisir, d’harmonie, de collaboration, de sécurité et de bien-être. Le parent doit donc s’écouter et réagir tout de suite quand il sent un agacement, une irritation pour rectifier le tir de l’enfant. C’est le moment de dire « NON » à tout excès et à tout dépassement des limites du cadre. Lorsque la sensation de plaisir s’évanouit pour laisser place à la colère, l’impatience, l’insécurité, le malaise, l’inconfort, c’est le moment de dire « NON ! Je n’accepte pas! ».
Éviter de se « piler dessus »
Si le parent se « pile dessus » et demeure réceptif face à l’inacceptable, l’enfant comprendra que « TOUT » lui est permis. Il s’aventurera hors-piste dans des sentiers houleux et dangereux. De plus, son intégration sociale en souffrira. Une publicité récente du Gouvernement du Québec énonce ceci : « Ce qu’ils apprennent à la maison, ils l’amènent à l’école » et, en bas de page, « le respect, le devoir de tous ».
Le respect, le devoir de tous!
Quand on pense à ce qui se passe maintenant dans nos écoles, les enseignants sont de plus en plus aux prises avec des élèves qui manifestent des difficultés de comportement. La situation est si sérieuse que plusieurs enseignants quittent le bateau tellement la charge d’éducation est lourde. Qu’est-ce qui se passe, vous pensez? Il se passe que des parents veulent être trop bienveillants et qu’ils ne communiquent plus les limites du respect à leur enfant. Ce dernier se croit « TOUT » permis. Il amène à l’école ce qu’il a appris à la maison, soit son manque de limites. La publicité du Gouvernement du Québec dit vrai.
L’enfant amène son manque de limites
Son manque de limites s’accompagne d’un manque de respect. Il amène donc une panoplie de comportements désagréables et inacceptables tels qu’intimider, crier, abuser, agresser, invalider, projeter son énergie sans limites, contester, s’objecter, transgresser les règles, désobéir, etc.
Apprendre à dire « NON » est essentiel!
Apprendre à dire « NON » est essentiel pour le parent pour jouer son rôle correctement dans l’éducation personnelle et sociale de l’enfant. Maintenir la qualité de la relation dans le plaisir et l’amour, avec des limites et contours que la sensation de plaisir nous donne. Le parent dit « OUI » au plaisir et « NON » au déplaisir. Ainsi, l’enfant perçoit bien le cadre dans lequel il peut circuler et les limites qu’il doit respecter. Il ne s’agit pas de communiquer des limites dures comme c’était le cas auparavant. Mais il s’agit de limites fermes et solides. À bas la mollesse, la mièvrerie, l’impuissance, la passivité, la démission, le désengagement, le renoncement à son pouvoir comme parent, le manque de ressort, l’amabilité excessive, l’aveuglement et le déni face aux problèmes vécus avec l’enfant. Sans limites, il faut bien le dire, l’enfant est mal foutu! Son intégration à la vie sociale est compromise! Lorsqu’il se présente sans limites dans la société, comment la société éduquera-t-elle l’enfant? Il y a là une lourdeur pour la société! Il n’est pas certain que l’apprentissage se fasse harmonieusement comme elle peut se faire entouré de l’amour de ses parents.
Les limites sont sécurisantes
Les limites sont sécurisantes pour l’enfant. Elles ramènent l’enfant aux limites de son territoire respectif et l’aident à se structurer dans le respect du territoire de chacun. Comme si les limites délimitaient un cercle autour du corps de l’enfant en érigeant des frontières à ne pas dépasser. L’enfant prend ainsi conscience de la juste distance à respecter pour ne pas envahir le territoire de l’autre et pour protéger son propre territoire. L’enfant prend alors sa juste place, sa juste part du gâteau, respectant la juste mesure. Il apprend à se contenir et cela est sécurisant dans la construction de l’identité de l’enfant. L’illustration jointe ici montre une position bien délimitée pour chaque enfant. Le respect de chacun est alors possible car les limites sont établies.
Repenser notre approche trop bienveillante
On a besoin de repenser notre approche face à l’enfant si on observe ce qui se passe à l’école. Un repositionnement est nécessaire pour adopter une intervention plus démocratique, où chacun a sa place et exerce son pouvoir de manière respectueuse. Au nom du « laisser-vivre », les parents peuvent ne pas prendre leur responsabilité d’apprendre les limites à respecter à l’enfant. Tout le monde en souffre! Les conséquences sont nombreuses et désastreuses! À l’école, par exemple, ça devient vraiment trop lourd la charge qui est transférée aux enseignants! Tout le système social doit prendre le relais. Ce n’est pas souhaitable! Il y a un impact collectif à la position trop laxiste que les parents prennent parfois.
L’intervention démocratique se fonde sur deux forces : une force pour accueillir l’enfant et une force pour lui communiquer des limites saines. Autant on évite la mollesse, autant on évite la dureté que l’on a déjà connue. On recherche « le juste milieu ». (À cet effet, voir l’article paru dans viedeparents.ca ; « Comment mettre ses limites claires dans sa relation avec l’enfant »).
Les parents auraient intérêt à discuter entre eux de manière honnête pour s’entraider et se soutenir. De vrais échanges qui décrivent les enjeux rencontrés dans la relation avec l’enfant, dont la difficulté à dire « non » et à mettre des limites. Des échanges où on ne nie pas le problème au nom de principes comme le « laisser-vivre » et la bienveillance sans limites.
Conclusion
Le parent a besoin de se libérer de la culpabilité et de la peur qu’il peut ressentir en communiquant ses limites. La frustration est structurante pour construire son identité de manière saine. Avez-vous remarqué que l’enfant teste toujours les limites de l’adulte avec qui il interagit. Ça nous donne un bon indice qu’il a besoin de limites pour se sécuriser et définir son territoire. Les bienfaits d’une relation avec l’enfant où les limites sont communiquées et respectées sont nombreux : c’est agréable d’être en compagnie de cet enfant, ce n’est pas lourd pour la société! De plus, l’enfant se construit une identité saine qui le soutiendra dans toutes ses relations. Et les parents se respectent eux-mêmes et ne s’oublient pas. Le plaisir est donc au rendez-vous!
Par Jocelyne Petit, Docteure en Sciences de l’Éducation
Illustration de Niko Henrichon
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