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Les parents se séparent : comment accompagner l’enfant? PARTIE 1
Plus que la séparation elle-même, ce qui a une incidence majeure sur l’enfant et sur l’adulte qu’il deviendra, c’est la façon dont la séparation est vécue (1). Or, la séparation produit un choc psychologique pour toutes les personnes qui la vivent. Intervenir auprès de l’enfant et de l’autre parent pendant ce passage difficile ne va pas de soi. Voici quelques pistes d’intervention pour mieux vivre cette crise et mieux accompagner l’enfant.
Faire face aux émotions négatives vécues lors de ce passage est probablement ce qui est le plus difficile, tant pour le parent que pour l’enfant. La tristesse, la déception, la colère, la culpabilité, le sentiment d’abandon, l’insécurité, l’anxiété, la frustration, le sentiment de rejet, la détresse, etc. sont autant d’émotions susceptibles d’apparaître dans le paysage intérieur des personnes qui vivent une séparation. Accueillir, ressentir ces émotions bouleversent le monde que l’on s’est créé et produisent un choc psychologique certain (1). La vision que l’on a de « la famille » se transforme. Pour les parents, il est difficile de déconstruire la relation affective qu’ils avaient établie. L’expérience peut être vécue comme une « faillite affective » (1). Alors que l’enfant a besoin de soutien pour accueillir, ressentir ses émotions en les verbalisant pour humaniser par la parole la souffrance qu’il vit, la disponibilité de l’adulte en ces moments où, lui aussi, traverse un passage difficile, n’est pas évidente.
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En ressentant ces émotions négatives, il peut être très tentant de projeter sur l’autre sa charge émotive. Accuser l’autre, le blâmer, le critiquer, le dénigrer. Adopter des comportements déplacés. Sortir de ses gonds. Autant d’indices qui démontrent la difficulté à contenir l’énergie négative! Si le parent tombe dans ce piège, l’enfant sera le plus affecté négativement. La vengeance, la compétition, la rancœur, l’hostilité créent un climat de tension qui n’en finit plus et ça devient toxique pour l’enfant qui a besoin de modèles qui l’aident justement à contenir les émotions négatives qu’il ressent.
Développer une distance émotive pour voir ses émotions sans se laisser envahir par elles en les contenant et établir une distance critique par rapport à l’autre parent pour éviter le piège de la projection sur l’autre sont des interventions aidantes qui favorisent l’adaptation à la nouvelle réalité pour le parent comme pour l’enfant.
Le dénigrement d’un parent dérange l’enfant au plus haut point et engendre une blessure affective en mutilant une partie de lui, une partie de son héritage. De même que le dénigrement des sexes dans des généralisations telles que « Les femmes sont… », « Les hommes sont… ». L’enfant a besoin de ses deux parents pour se développer sainement. Il est donc important d’entretenir une image positive des deux parents pour l’enfant. (Il est à noter que, tout comme dans la référence citée, ne sont pas traitées ici les situations particulières de violence conjugale, de troubles psychiatriques ou abus de tous genres.)
Développer une communication efficace entre les parents pour poursuivre ensemble l’éducation de l’enfant malgré la rupture.
Cette communication efficace s’appuie sur des attitudes qui la favorisent (1).
- Savoir transmettre des messages clairs reliés au présent au lieu de ramener constamment des choses du passé.
- Savoir écouter en silence, sans couper la parole et essayer de comprendre ce que l’autre dit.
- Formuler une rétroaction pour vérifier que l’on a bien compris ce que l’autre a voulu dire.
- Savoir réagir à l’expression des sentiments; ce qui demande de la flexibilité et une capacité de contenance, comme il a été discuté plus tôt.
Lorsque la communication verbale ne fonctionne pas, utiliser d’autres façons de communiquer comme, par exemple, tenir un carnet de bord pour écrire les évènements marquants que l’enfant vit. La communication écrite demande de réfléchir et cela peut être plus facile de démontrer les attitudes positives favorisant une communication efficace citées plus haut.
Il est proposé de s’entendre sur une charte de coparentalité où des principes fondamentaux sont énoncés qui agissent comme un phare pour reconstruire la relation parentale et établir un cadre à respecter. S’entendre entre parents pour éviter de se parler sous l’emprise de la colère et développer une communication polie pour prévenir la vulgarité et les excès divers. Recourir au besoin à des ressources extérieures de médiation familiale lorsque nécessaire.
Prendre soin de soi comme parent pour pouvoir mieux accompagner l’enfant.
- Trouver des moyens pour atténuer le stress et le ramener à un niveau non destructeur comme parler à quelqu’un pour développer une compréhension de son vécu.
- Se pardonner des erreurs et des fautes. Éviter le perfectionnisme.
- Garder son pouvoir pour analyser ses propres réactions plutôt que de se centrer sur les réactions de l’autre parent.
- Faire une recherche de sens pour comprendre son expérience et ses choix et ainsi éviter la répétition de schèmes insatisfaisants.
- Se ressourcer et se donner un répit pour se donner du temps à soi.
- Recourir à des ressources extérieures au besoin.
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Par Jocelyne Petit, Docteure en Sciences de l’Éducation
Référence
- Richard Cloutier, Lorraine Filion, Harry Timmermans, Les parents se séparent, Mieux vivre la crise et aider son enfant, 2 e édition, Éditions du CHU Ste-Justine, 2018