Il y a quelques semaines de cela, j’attendais en ligne pour payer au marché. J’entends alors une fillette demander à sa mère: «Maman, c’est quoi les changements climatiques». Sa maman a été silencieuse un moment, le temps de rassembler ses idées et a fini par dire: «C’est la planète qui a mal à cause de nous.» La petite fille a donc renchéri du tac au tac : «Mais on doit faire quoi pour la guérir?». Ce à quoi sa mère s’est empressée de répondre avec un ton qui laissait sous-entendre que la conversation se terminerait là: «Recycler, il faut recycler» .
Si le monsieur derrière moi ne m’avait pas fait des gros yeux pour que j’avance vers la caisse, je me serais probablement invitée dans la conversation. Avec moins de 9% de tout ce qui est envoyé au recyclage réellement recyclé, les probabilités de «soigner» la planète à grand coup de bac bleu relèvent plus de la pensée magique que de la réalité.
Mais cette conversation m’a fait réaliser qu’il est loin d’être évident d’aborder certains sujets avec nos enfants, comme les changements climatiques, ou encore le racisme, les discriminations, l’égalité des sexes pour ne nommer que ceux-ci. Comment éduquer et sensibiliser ces petits citoyens de demain, sans les effrayer… ni minimiser la situation?
S’il peut parfois sembler difficile de parler de la crise climatique avec de jeunes enfants, je suis tout de même d’avis qu’il n’est jamais trop tôt pour commencer, seules les méthodes, l’angle d’approche et le vocabulaire varieront.
Communication pro-active et ton positif
Je pense que nous serons tous et toutes d’accord sur une chose, nous protégeons plus facilement ce que nous aimons. Une façon toute simple de favoriser l’appréciation de la nature par nos tout-petits est de les y initier: allez jouer dehors! Pour susciter l’amour – et le respect – de la nature, le plein air est une bonne porte d’entrée. Que ce soit pour faire du sport, se relaxer, dessiner ce qui nous entoure ou encore pique-niquer, les bienfaits de la nature sont nombreux.
Selon une étude publiée en 2019 dans Frontiers in Psychology, « [d]es centaines d’études portent maintenant sur cette question, et les preuves convergentes suggèrent fortement que les expériences en nature stimulent l’apprentissage académique, le développement personnel et les attitudes pro-environnementales. »
Même s’il est urgent d’agir, il ne sert à rien de brosser à nos jeunes enfants un portrait noir de la situation. Loin de nous l’idée de les paralyser par la peur. Selon plusieurs psychologues, dont Karine Roy-Déry et Christine Barois, il s’agit plutôt de les accompagner dans les gestes à poser, les réflexes à adopter, les solutions qui s’offrent à nous. Adopter une communication pro-active et un ton positif. Pourquoi ne pas les amener avec vous au marché du coin et en profiter pour parler de l’importance d’acheter local et de diminuer notre consommation de viande pour l’environnement, par exemple?
Quand les bottines suivent les babines – la cohérence un élément clé
Vos écologistes en herbe vous écoutent – si vous êtes chanceux – mais surtout ils et elles vous regardent agir. Vous devez donc être cohérent·e. Si vous dites que l’environnement est important, démontrez-le au quotidien, surtout si vous dites que des actions peuvent être prises au niveau individuel. Vous devez en adopter quelques-unes vous-même, tout en profitant de la curiosité naturelle de nos enfants pour expliquer les concepts qui se cachent derrière les petits gestes.
Vous serez étonné·es de la vitesse à laquelle vos petit·es rejoindront la danse et vous feront remarquer que vous vous êtes trompé·es et que vous avez choisi des tomates de serres venant des États-Unis et non celles cultivées au Québec!
Quand les mots nous manquent
Parfois par contre, à vouloir parfois trop en dire, être trop précis·e ou encore trop technique, on se perd et on perd notre progéniture au passage! Je ne sais pas pour vous, mais ici l’heure du conte avant le dodo est sacrée et j’en profite pour me laisser guider par des mots d’auteurs et d’autrices qui ont su mieux expliquer, mieux imager…
Voici mes favoris en ce moment:
GRETA ET LES GÉANTS
Mon avis: Ma fille de trois ans et demi adore cette histoire et s’identifie au personnage principal – Greta, enfant. L’histoire, qui est facile à comprendre et magnifiquement illustrée, démontre que nous pouvons agir à titre de citoyens, nous faire entendre et changer les choses, peu importe notre âge. J’adore également le fait que sont expliqués de façon simple certaines causes de la crise actuelle, mais également des pistes de solutions.
LE SECRET DU ROCHER NOIR
Mon avis: Un autre coup de coeur. Non seulement est-ce que l’histoire est intéressante, mais en plus elle met en scène Erine, notre héroïne et sa maman, pêcheuse. Vivement la déconstruction des stéréotypes de genre. Ce livre nous fait découvrir la beauté de nos océans, mais introduit également le concept de “désobéissance civile”! Évidemment, c’est fait en douceur, mais démontre tout de même que parfois, il est nécessaire de se lever pour changer les choses.
NIBI A SOIF, TRÈS SOIF
Mon avis: Nibi (dont le nom signifie « eau » dans la langue anishinaabe) est une jeune fille autochtone à la recherche d’eau potable. J’ai la version anglaise de ce livre, mais l’histoire est très chantante, c’est magnifique. Ce que j’aime particulièrement de ce livre c’est qu’il nous fait réaliser que les ressources naturelles sont précieuses, mais qu’elles sont inéquitablement réparties et que les communautés autochtones ici même au Canada, sont victimes du colonialisme et de racisme environnemental. De grands concepts, abordés avec doigté par Sunshine Tenasco et Chief Lady Bird.
KULU ADORÉ
Mon avis: Poétique, doux, magnifiquement illustré, ce livre canadien est A-D-O-R-A-B-L-E. Écrit par Celina Kalluk et illustré par Alexandria Neonakis cette histoire et berceuse nous raconte comment le petit Kulu est accueilli dans ce monde par les animaux du Nord qui sont à la fois sages, majestueux et enchanteurs.
CLIMATE CHANGE FOR BABIES
Mon avis: Celui-ci est en anglais seulement pour l’instant, mais j’adore la capacité de ses auteurs à vulgariser les causes profondes des changements climatiques. Super facile à lire et à comprendre, je le raconte à ma petite, mais j’aimerais bien le faire lire à beaucoup de «grandes personnes»! 🙂
LA PRINCESSE DE L’EAU CLAIRE
Mon avis: Inspirée de l’enfance de l’activiste Georgie Badiel au Burkina Faso, cette histoire a eu un grand succès ici. Gie Gie qui apprivoise les chiens sauvages avec des chansons, qui fait onduler les herbes hautes quand elle danse, qui joue à cache-cache avec le vent. Cette histoire à ouvert la porte à des conversations sur l’accessibilité à l’eau.
FLORE ET NOÉ RELÈVENT LE DÉFI ZÉRO DÉCHET
Mon avis: Petit bijou québécois! Nous sommes à mi-chemin entre la BD et le texte continu. C’est toutefois un livre pour les plus vieux (genre 6 ans et +). Noé y discute avec une scientifique. Gageons que vos petit·es arriveront avec de nouvelles idées pour réduire la surconsommation suite à cette lecture.
Bref, bonne lecture et bonne discussion!