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Peur de la « normale »

 

Dans les dernières semaines (ou était-ce des mois, des années?), on entend beaucoup parler de retour à la normale. On souhaite ce retour à la normale, on se sent privés de plein de choses, on attend impatiemment que les mesures de confinement soient levées…

 

L’angoisse monte en flèche, on a les yeux rivés sur le point de presse, on lit les dernières nouvelles, souvent avec des enfants dans les pattes, on tente de faire un peu de yoga, de course, d’activités éducatives… bref. On capote.

 

Moi, ce qui me fait capoter, ce qui me donne une boule dans la gorge, justement, c’est ce retour à la normale que j’ai l’impression que tout le monde espère.

 

En tant que grano experte, qu’écologiste assumée… le retour à la normale, moi, je trouve qu’il n’a RIEN de normal. Pourquoi?

 

Parce que ce n’est pas normal que prendre l’avion coûte 200 $ pour aller en Islande, quand on sait combien le transport aérien pollue notre atmosphère.

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Parce qu’on ne devrait jamais considérer comme normal le fait de pouvoir acheter un chandail à 5 $ dans un magasin qui stocke de nouvelles collections chaque semaine. Je couds une bonne partie de mes vêtements, et le seul moyen que ça coûte 5 dollars serait que je ne sois pas payée pour le faire (jusque-là, correct, je ne suis pas payée pour mes loisirs, mais il y en a dont c’est le métier) et que mon tissu vienne de mon drap contour. Qui a bien dû, il y a quelques années de cela, coûter plus que 5 dollars de toute façon.

 

Parce qu’on ne devrait pas trouver normal de se déplacer une heure et demie pour aller travailler.

 

Parce qu’on ne devrait pas trouver normal de voir nos enfants moins que nos collègues.

 

Parce qu’on devrait refuser la normalité qui nous dicte de nous dépêcher constamment, de ne jamais avoir le temps de lire un livre, faire du pain, jouer avec nos enfants, prendre soin de nous et de notre maison…

 

De quoi j’ai peur? Que dès qu’on le peut, tout recommence comme avant, à une vitesse folle. Qu’on vive de nouveau pour travailler, pour payer notre maison, qu’on quitte en avion à la première journée de vacances venue.

 

Mon seul espoir est que cette longue période étrange, inquiétante et anxiogène n’ait pas été en vain. Qu’on réfléchisse. Qu’on réalise à quel point c’est primordial d’avoir un filet social, ce même filet social qui prendra soin des plus vulnérables et donnera le moyen à nos anges gardiens, justement, de prendre soin de nous en temps de crise. Qui donnera le moyen de nous aider NOUS si jamais tout ça revient. Pour qu’on pense au NOUS plutôt qu’au JE.

 

JE dois annuler mon voyage dans le Sud. JE vais perdre des sous. JE ne pourrai pas aller en vacances cet été.

 

NOUS allons nous en sortir si NOUS respectons les consignes pour protéger ceux d’entre NOUS qui sont plus à risques.

 

Je vis moi aussi de grandes pertes : liberté, solitude nécessaire à ma vie de mère sauvage qui ne veut pas constamment être collée sur ses êtres chers même si je les adore, énorme contrat de théâtre cet été sur lequel je travaillais depuis un an… Mais à côté de la souffrance de d’autres, ce n’est rien. Et je n’aurai jamais été aussi heureuse de payer mes impôts cette année, quand je viens d’avoir la démonstration claire d’à quoi ça sert, de contribuer à NOTRE société.

 

Prenez soin de vous. Et profitez de cette période pour vous aimer. <3

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