Depuis quelques semaines, on entend particulièrement parler de résilience. La situation covidique qui nous assaille tous nous pousse particulièrement à faire preuve de résilience. Pour ma part, tout ça me fait constater que je pratique à mon insu cette fameuse résilience depuis plusieurs mois déjà, voire quelques années…
Avec le recul et la situation actuelle, je réalise que la relation dans laquelle je vis me force à constamment faire face à des événements plus ou moins difficiles, et particulièrement depuis la naissance de ma fille. Je dois sans cesse m’adapter, rebondir, me faufiler, me défendre, argumenter, surmonter ces obstacles et ces moments douloureux de ma relation qui me font remarquer que, malgré de nombreuses discussions et une volonté d’amour uni, nous sommes à un point de non-retour. Nous sommes trop différents et nous le serons toujours. Notre vision de l’éducation, d’une famille heureuse et du bon développement d’un enfant sont trop éloignés. Je dois tristement admettre que je suis dans une relation où l’adversité est quotidienne et le stress, omniprésent.
J’assume seule depuis plusieurs années une charge mentale grandissante, surtout depuis la naissance de ma fille. Je dois gérer et accomplir seule les responsabilités familiales et financières liées à la maison et notre fille. En période de télétravail, le seul moment de pause auquel j’ai droit est le soir, quand je m’effondre de fatigue dans mon lit et que je dors à 21 h. Entre les heures de travail, je dois préparer les repas, faire le ménage, les courses et m’occuper un moindrement de ma personne… toute seule. Mon engagement dans cette relation, dans cette famille est visiblement intense, élevé et à sens unique.
Après avoir souhaité, espéré, idéalisé, prié, désiré profondément une relation et une famille heureuse et unie; après avoir fait plusieurs tentatives de discussions avec mon conjoint pour lui faire comprendre l’ampleur de la charge que j’assume; après avoir tout fait de bon cœur pour maintenir un climat sain et satisfaisant pour le bonheur de ma fille; après avoir lâché prise sur tous ces petits moments douloureux et ces accrochages quotidiens; après avoir simplement abandonné… Je crois et je sais que je suis une personne extrêmement résiliente et tolérante.
Oui, la covid-19 me pousse davantage à être résiliente, mais je prends encore plus conscience de ma dévotion et de tout ce que je fais par moi-même pour le bien familial, alors que mon conjoint est sans travail, à la maison, à jouer avec notre fille ou sur son téléphone…
Tel que l’a si bien dit Boris Cyrulnik : « La résilience, c’est l’art de naviguer dans les torrents. » Force est d’admettre que je me suis épuisée à force de ramer seule dans un bateau, à vent contraire. Les torrents sont rendus trop forts, je vais changer d’océan.